Sylvain et Sylvie ont un rêve, un projet de retraite. Avoir leur propre vignoble au Québec. On est au début des années 2000. Sylvain est agriculteur depuis quarante ans à Coteau-du Lac, dans le mais jusqu’aux oreilles…et il connaît ça avec ses 600 acres à cultiver. Un vrai de vrai. La terre, le climat, comment ses plantes réagissent etc., il a ça dans le sang.

Et Sylvie qui vient d’un univers totalement différent. Dans un poste de direction au sein d’une des plus grosses boîtes en technologie de l’information/informatique au Québec et ailleurs; c’est une ‘’workaholic’’. C’est dans cet univers dont je faisais partie que je l’ai rencontré pour la première fois

En 2009, le vignoble de Pomone à Coteau-du-Lac voit le jour, on plante des hybrides (30,000 plants de vigne) comme pas mal tout le monde, pour palier au climat du Québec. Ça prend des vignes robustes. On s’entoure des meilleurs experts pour faire le mieux possible et éviter les erreurs coûteuses. Le vignoble s’appellera Pomone car c’est la déesse des fruits et la protectrice des vignes et des plantes.

Vignoble de Pomone

Et au fil du temps ça devient de plus en plus gros. Le vignoble est rendu à 12 hectares de vignes plantées avec une densité d’approximativement 3,500 plants de vignes par hectare et 40,000 pieds de vigne. Il fait pratiquement partie des 10 plus gros vignobles au Québec ou tout près. On y a planté surtout des cépages hybrides et on y a aussi ajouté des cépages Vitis Vinifera tels le Riesling, Pinot noir, Pinot gris, Riesling et Chardonnay.

J’ai déjà eu le plaisir de faire les vendanges (millésime 2018) avec cette gang là. Que de plaisir nous avons eu!!

Vignoble de Pomone

Sylvie, forte de son expérience en affaires avec des clients importants et prestigieux, applique les mêmes principes de développement stratégique à l’orientation du vignoble. C’est en juillet 2019 qu’ils ont commencé à vendre leurs vins et depuis c’est le succès qui est au rendez-vous!!

Pour plus d’information sur le vignoble, lisez l’entrevue que j’ai faite avec eux cette semaine. Cette entrevue suit les notes de dégustation des vins du vignoble.

Vignoble de Pomone

Notes de dégustations

Les vins du Vignoble de Pomone sont disponibles au chai qui est situé au 144 chemin de la rivière Delisle Sud, Coteau-du-lac (QC) J0P 1B0.  (514) 929-3166 ou (450) 308-3166. Vous pouvez passer vos commandes en ligne sur le site du vignoble : https://vignobledepomone.ca/vins. Pour la livraison les quantités minimum sont de 12 bouteilles et plus. On livre gratuitement à Montréal, Laval et La Rive-Sud de Montréal.

Vous pouvez aussi accéder à la liste de tous les points de ventes au Québec en consultant le site web.

Vin blanc

Vignoble de Pomone, Uni, Sélection, 2018, vin blanc, $21.00, cépages : St-Pépin, Acadie blanc, Cayuga, sucre : 0.48 g/l, alc. : 13.3%.

Ce vin est caractérisé par des accents fruités et floraux assez intenses. Le nez est sur des arômes de fruits blancs, de noyaux d’abricots, quelques notes sucrées et résolument florales. D’ailleurs ce vin a vieilli dans des fûts d’acacia. L’équilibre aromatique nez et bouche est superbe! Les flaveurs perçues au nez se retrouvent en bouche de façon assez intense. La texture est un brin grasse et veloutée, l’acidité est moyenne et la finale se prolonge sur une belle perception de minéralité avec comme une légère amertume en fin de bouche.

Vignoble de Pomone, Uni, Sélection, 2018

Vin Orange

Vignoble de Pomone, Ode Classique, 2018, vin orange, $26.00, cépages : Louise Swenson, Swenson white, Prairie Star, Sabrevois, Frontenac gris, Frontenac blanc, alc. : 11.1%, sucre : 0.25 g/l.

C’est un vin de macération pelliculaire. C’est à dire qu’il est élaboré comme un vin rouge. Le jus du raisin entre en contact avec les peaux des raisins pour une brève période.

Pour le genre vraiment très beau et bien typé! Ce vin se démarque par sa sensation de minéralité, son soupçon de trame tannique et ses flaveurs d’orange et de sucre d’orge. Au nez se dégagent des effluves d’orange et de zeste d’orange, de sucre d’orge et un soupçon de notes de pêches et d’abricots. C’est un vin qui offre une belle structure avec comme un brin de tannins assez discrets, une texture asse ferme et une acidité rafraîchissante. La finale dégage une légère amertume comme une saveur résiduelle de zeste d’orange.

Vignoble de Pomone, Ode Classique, 2018, vin orange

Vins rouges

Voici ce que Sylvain en pense : ‘’Je sais pas si tu as remarqué mais nos vins rouges ont sensiblement la même signature. Ils ont tous ce goût et cette senteur d’humus, de sous-bois. Le Sélection rouge on l’a travaillé dans la ligne d’un Cahors avec un peu plus de Baco, le Classique on l’a travaillé pour qu’il soit plus souple, plus simple et le Réserve avec plus de notes boisées. Mais les trois ont une belle signature commune. Quant à l’humus ont est parmi les seuls à avoir ce profil-là. C’est pas les mêmes clients qui achètent ces trois rouges là.’’

Vignoble de Pomone, Sens Classique, 2018, $22.00, cépages : Frontenac noir, Sabrevois, Léon-Millot et Triomphe d’Alsace, alcool : 11.2%, sucre: .38 g/l.

Ce vin est résolument sur des notes fruitées assez intenses avec un accent de crème de fruits rouges et noirs, de fumée, de sous-bois, de cèdre ainsi qu’un soupçon de notes herbacées. Ce qui caractérise la bouche c’est cette pointe d’acidité bien fraîche et d’épices douces qui créent un beau contraste avec les flaveurs de fruits noirs. Belle structure avec des tannins presque charpentés et tissés bien serrés. J’ai senti un peu d’astringence signe de la jeunesse de ce vin. La persistance est moyenne et on perçoit une légère amertume en fin de bouche.

Vignoble de Pomone, Sens Classique, 2018

Vignoble de Pomone, Sens, Réserve, 2018, $25.00, sucre: 0,59 g/l, alcool :12,8%, cépages : Léon-Millot, Frontenac noir, Baco noir et Triomphe d’Alsace

Le profil aromatique de ce vin est entièrement différent du précédent. Le nez se découvre sur des effluves de vanille, de fruits rouges et noirs, d’eucalyptus et de légères notes boisées et de sous-bois. En bouche ce sont les notes boisées qui prédominent ainsi que des notes d’épices douces assez intenses. La texture est de ferme à veloutée, l’acidité moyenne et les tannins sont charpentés et tissés bien serré. Bel équilibre dans ce vin avec une certain volume en bouche et une belle persistance.

Vous ferez de beaux accords avec des viandes rouges grillées, du gibier et de l’agneau braisé.

Vignoble de Pomone, Sens, Réserve, 2018

Vignoble de Pomone, Sens, Sélection, 2018, $23.00, sucre: 0,3 g/l, alcool : 12,5%, cépages : Frontenac noir, Baco noir et Triomphe d’alsace.

Mon préféré des 3 vins rouges pour son équilibre et son profil aromatique. Le nez est sur des arômes de pâtisserie, de moka, de tabac et de sous-bois. La bouche est tout en équilibre avec une texture veloutée, une acidité équilibrée et des tannins équilibrés à charpentés. Quelques notes fumées, d’un beau boisé bien fondu entremêlées d’un rappel des flaveurs perçues au nez. Belle complexité aromatique et très belle persistance.

Vignoble de Pomone, Sens, Sélection, 2018

Vin dessert

Vignoble de Pomone, 375 ml, vin dessert, $49.00, cépage : Vidal, sucre : 167 g/l, alc. :13.4%. Étiquette à venir.

Quel coup de cœur!! Assez incroyable ce qu’on peut élaborer du cépage Vidal surtout quand c’est bien fait ce qui est la cas ici! On parle ici d’un vin dessert dont on a concentré les saveurs et le taux de sucre par le passerillage. Sur des notes de miel, d’abricots et de pêches confits, de fruits exotiques et d’accents d’orange brûlée. La bouche est grasse et veloutée, pas trop sucrée malgré ses 167 g/l et les flaveurs perçues au nez prennent leur envol pour notre bonheur total. Et quelle longueur…

Vignoble de Pomone, 375 ml, vin dessert

Entrevue avec Sylvain, Sylvain et Sylvie

Histoire de renouer, on s’est fait une belle entrevue avec Sylvain (Poirier), Sylvie (Bissonnette) et Sylvain (Gauthier). En voici l’intégrale!!

Sylvie Bissonnette (SB): “Grosse nouvelle, Sylvain a 53 ans et va être à sa retraite !! Il va maintenant mettre tout son temps dans le vignoble pour donner un coup de main à toute l’équipe. Et ça va super bien! On est rendu à 800% d’augmentation de nos ventes depuis 3 semaines. Faque c’est malade! On travaille fort pour établir un réseau de ventes.

C’est intéressant parce que ce sont eux qui nous appellent et qui viennent à nous. Le bruit qu’on fait sur Instagram et Facebook ça nous donne des résultats. La sortie de notre vin orange a été un réel succès. Ça été un gros hit parce que c’est très à la mode, tout le monde en parle partout. C’est vraiment touchant de sentie de ce succès et cette acceptabilité même dans les restaurants les plus prestigieurx du Québec!

Il y a eu beaucoup de changements depuis que tu es venu pour les vendanges. A chaque année on plante entre 11 et 13,000 vignes. On est rendu à approx. 40,000 plants de vignes. On a eu des ratés avec certains cépages surtout dans le Vinifera (Pinot Gris, Pinot Noir, Chardonnay, Riesling) à cause du froid particulièrement intense. On a eu 75% de mortalité avec ces cépages. On va se réessayer parce qu’on en a replanté d’autres. On a choisi une autre zone du vignoble qui devrait être plus propice pour ces cépages’’.

Vignoble de Pomone

Sylvain Poirier (SP): ‘’C’était vraiment une mortalité hivernale et j’ai compris pourquoi. Je vais choisir un autre endroit où on a présentement du Swenson White. Je pense que je peux l’arracher et planter du Vinifera. Chez nous on accumule beaucoup de glace dans le vignoble à certains endroits. Je suis collé sur le lac St-François et près de l’embouchure du lac Ontario. Vaudreuil Soulanges est reconnue conne une région plus humide qu’ailleurs. Et l’hiver on des courants d’air de chaud et de froid. Alors il se forme plus de glace ici qu’ailleurs. Une journée il peut pleuvoir et le lendemain il fait -30C. L’année où on a planté le Vinifera j’ai jamais vu un hiver froid comme ça. Je vais me réessayer et je suis sûr que je vais réussir’’.

SB: ‘’On réalise qu’on commence à faire de meilleurs vins avec nos cépages hybrides. Ce sont probablement les changements climatiques qui nous aident et l’expérience qui rentre. Quand je regarde notre façon de travailler, théoriquement on devrait être parmi les vignobles qui font leurs vendanges en premier. Et nous on fait toujours nos vendanges en dernier pour aller chercher la pleine maturité des raisins. On travaille beaucoup avec le risque de dernière minute. Et ça été payant cette année. On n’a pas besoin de chaptaliser (ajout de sucre) alors que beaucoup le font ».

Vignoble de Pomone – source: Guy Nolan

SP: ‘’J’aime beaucoup les cépages hybrides français qui ont été développé au début des années 1900. Les français avaient sortis de très beaux hybrides. Je les préfère aux hybrides américains. Savais-tu qu’à Niagara on the Lake ils retournent aux hybrides. Il y a un producteur propriétaire d’environ 1,200 acres qui nous fournit en hybrides comme du Chambourcin par exemple et autres cépages. Ces hybrides français ça va faire partie des cépages hybrides qu’on va ajouter cette année.

VF (Vinformateur): J’ai beaucoup aimé votre Vidal (vin passerillé) soit dit en passant!

SB: ‘’On l’a tout mis dans notre vin passerillé et on en a juste 200 bouteilles avec le 2018 et c’est déjà tout vendu. Pour la cuvée 2019 il faut qu’on se réajuste. On ne pensait pas connaître un tel succès avec parce qu’il est plus cher. On en vend autant que du blanc et que du rouge. On a augmenté notre plantation de Vidal dans le vignoble pour avoir une meilleure production. On va en avoir environ 300 litres pour environ 1,000 bouteilles.

En général au vignoble, on n’a pas assez de blanc. On en vendrait plus.

On a rajouté du Cayuga blanc dedans et les gens aiment plus cet assemblage. Ça lui donne une touche particulière.

La cuvée entière de 2019 on l’a multipliée par 4. Avec le millésime 2018 on a produit environ 9,600 bouteilles. On est en train d’exploser car en 2019 on devrait être à 28,000 bouteilles. En 2021, 2022 on devrait faire 60,000 bouteilles.

Vignoble de Pomone – source: Guy Nolan

Ce qu’on a fait, on a eu le luxe cette année d’avoir une énorme récolte donc on a laissé les cépages tous séparés dans des cuves différentes pour se laisser le loisir d’assembler à notre goût et avec l’aide d’experts. On va faire ça à l’automne et on t’invite avec d’autres sommeliers. Le but sera de trouver les meilleurs assemblages et des produits le fun. On a 40 cuves et barriques toutes séparées. On va pouvoir faire quelque chose d’intéressant.

Ce qu’on a compris des messages de nos clients, que ce soit les épiceries fines, les restaurants, la SAQ, les sommeliers etc. c’est qu’ils sont tannés d’avoir juste du blanc et du rouge. Ils veulent des nouveautés. La stratégie est donc de se diversifier par des nouveaux produits. Le vin orange en est un parfait exemple. En une semaine et demie j’ai vendu mes 1,600 bouteilles.

On a 4,000 litres de ce vin qu’on va embouteiller d’ici un mois. On veut plus aller vers ça. On va commencer à faire nos vins en amphores, on veut faire du vin gris, on a commencé à faire du vin fortifié.

Vignoble de Pomone – source: Guy Nolan

Tu sais, on a la chance d’avoir des cultures de fruits chez nous. On va commencer à faire des crèmes avec ces fruits là. On veut aussi faire du verjus (jus de raisins verts). Il n’y a personne qui en fait avec des vrais raisins. Ceux qui en font c’est avec des raisins bleus pas très bons, genre raisins standards’’.

SP: ‘’Moi je vais te parler de techniques de Chai. Moi je veux mieux comprendre les différences de terroir et leur impact sur le goût du vin. Un bon exemple c’est le Baco noir. A Niagara c’est une terre assez argileuse. Mais ce n’est pas la même argile que dans les environs ici. Et là j’ai déterminé que mon Baco est pas la bonne place dans le vignoble.  Il faut que je le déplace.

Et j’ai un autre endroit où le mettre qui est un peu plus argileux et j’ai bien hâte de voir la différence. Ça tombe bien parce que j’avais mis du Sabrevois parce qu’on me le conseillait dans une zone plus humide. Mais le Sabrevois on sait qu’il n’y a pas grand-chose à faire avec ça’’.

SB: ‘’Les nouveaux clients ils aiment les vins nature. On a plus de plus de jeunes professionnels qui se tiennent dans Griffintown qui suivent les blogues de vins et qui suivent toutes les nouvelles tendances. Donc ils aiment les vins très jeunes et très nature. C’est une nouvelle clientèle qui s’amène. On va travailler des vins dans ce style là avec ce type de clientèle là. Ce qu’on ne faisait pas avant.

Nous quand on goûte le vin on trouve qu’il est pas prêt mais eux ils nous demandent de l’acheter. On fait quoi? Comprends-tu? Je capote!’’

Vignoble de Pomone – source: Ted Van Rossum

VF: ‘’Écoute, il y a le marché plus mainstream qui représente le plus haut % de ventes et qui inclut selon moi les vins bio et possiblement en biodynamie. Puis il y a un autre groupe en émergence, plus jeune qui recherche des vins plus funky plus nature. La majorité des vignerons que je rencontre trouvent que ces vins dits nature ont beaucoup de défauts et ne sont pas de bons vins. On retrouve dans ces vins des petits producteurs qui produisent des vins sans sulfites ajoutés. Ces vins ont tendance à très instables et à développer des odeurs plus ou moins agréables s’ils ne sont pas bien faits.

Mais pour ce groupe cible de consommateurs ces odeurs selon eux sont ce qu’un vin “vrai” devrait goûter. Moi je n’aime pas en général ces vins. Il y a cependant des exceptions notables. Quand c’est bien fait, c’est excellent!

Pour faire des vins nature ce n’est pas juste de ne pas ajouter de sulfites. Il ne faut pas utiliser aucun intrant chimique ce qui peut être difficile pour plusieurs vignerons au Québec. Mais bon certains sont à tester cette approche. On verra’’.

SB: ‘’On va s’enligner la-dessus sans tomber dans l’exagération. Il y en a au Québec qui ont pris un virage nature et ça été négatif auprès de leurs clients. Il faut faire attention et bien approcher ces vins. Il faut faire attention à notre marque. On va explorer tout ça en faisant attention à l’ensemble de nos vins. Il faut penser à long terme. On est un peu hésitant face à ces vins-là.’’

SP: ‘’Je pense que c’est une mode. Et cette mode là elle va durer combien de temps? Si tu t’orientes vers ça, et tu scrappes ton nom par après je ne suis pas sûr pour les autres vins, moi je le sais pas. Je serais très prudent avec ça’’.

Sylvie, Sylvain et autres

VF: ‘’Quand tu regardes les ventes de vins dans le monde entier tout ce qui est vin bio, biodynamique et nature représente de 10 à 15% des ventes. Mais c’est en forte croissance. Il faut se rappeler que faire des vins nature ça part d’une philosophie qui est beaucoup plus large que juste ne pas ajouter de sulfites. C’est l’absence de tout intrant chimique par exemple’’.

SB: ‘’On s’est entêté un moment à ne pas mettre de sulfites et on a eu de bonnes pertes. La fermentation a reparti dans les bouteilles. Pour revenir au mix de cépages, il faut qu’on produise plus de vins blancs. Le vin blanc se vend super bien’’.

SP: ‘’On a 3,000 plants de Chardonnay dans la serre, on a 8,000 St-Pépin dans le vignoble avec 3,000 Acadie en plus. On a orienté la roue vers le blanc. La production de blanc n’était pas là mais là on a de 8 à 9,000 litres de blanc ce qui est mieux. On a 5,000 litres de St-Pépin pur alors on va pouvoir faire plus de blanc et possiblement un St-Pépin pur. Dans le blanc en plus je pense que je vais plutôt aller vers des futs d’Acacia de 500 l pour ne pas changer le goût du cépage.

En parlant de St-Pépin, beaucoup de vignerons ne l’aiment pas parce que c’est une plante unisexe. Elle n’est que femelle. Et ça prend un autre pollinisateur à côté. Et le problème c’est que la majorité des vignerons ne savent pas comment s’organiser pour le polliniser efficacement. On sort approx. 5 a 6 tonnes à l’hectare en temps normal, et moi je sors de 10 à 12 tonnes. Il peut être très productif. On en a vendu cette année. Tout le monde se l’arrache. On manquait de cuves pour faire notre propre vin alors on avait pas le choix de le vendre’’.

Vignoble de Pomone

SB: ‘’J’aime beaucoup la touche du fut d’acacia qui donne une touche florale au vin. Peux-être qu’on aura deux vins élevés dans des fûts différents’’.

VF: Regardez-vous à faire du mousseux?

SB: ‘’On n’est pas encore rendu là. On est plus parti sur le vin orange. Peux-être qu’on aura des produits gazéifiés sauf qu’on a fait des essais avec un carbonisateur et on n’aime pas les bulles que ça fait. Si on allait vers le mousseux, il faudrait aller vers la méthode champenoise’’.

SP: ‘’Moi avant que j’embarque dans le mousseux, à virer des bouteilles à la main…Occupé comme je le suis présentement, j’ai pas le temps pour ça. Il faudrait se mécaniser car on le ferait certainement pas à la mitaine. Mais on en est pas là. En partant je ne suis pas un amateur de mousseux.  Même pas de champagne’’.

VF: Beaucoup de vignerons que j’ai rencontrés cette année me disaient qu’ils aveint des problèmes d’approvisionnement au Québec. Est-ce le cas?

SP: ‘’Supposément que tous les vignobles sont en rupture de stock. Ceux qui s’occupent de leurs affaires. Même les plus gros’’.

Vignoble de Pomone

SB: ‘’Un bémol. Avec toutes les épiceries fines que j’ai rencontrées, ils me disaient que plusieurs vignobles ne sont pas capables de commercialiser des produits avec de bonnes et belles étiquettes. Beaucoup d’étiquettes sont à revoir. Et c’est important quand on sait que c’est un critère de choix dans la sélection des vins de la part des consommateurs. Ils ont beau parler du vin mais la bouteille n’est pas attirante. Le client reste bloqué sur l’emballage. Nous on reçoit beaucoup de félicitations pour le look de nos produits et évidemment pour leur goût.

On a mis beaucoup de temps à développer de belles étiquettes et on a mis pas mal de temps à sélectionner nos bouchons et nos bouteilles qui sont de la plus haute qualité’’.

VF: Vous êtes en forte croissance. Vous avez des choix importants à faire point de vue produits et cépages. C’est quoi les prochaines étapes.

SB: ‘’On a l’avantage que nos vignobles ne sont pas pleins. Ça nous donne de l’espace pour évoluer en fonction de ce qu’on vend et de ce qu’on veut vendre. Ce qu’on va planter on veut le choisir selon notre stratégie. Dans deux ans nos vignobles vont être tous plantés on va commencer à arracher et à replanter avec ce qui fonctionne.

On va élargir la gamme. On a du vin blanc, du vin rouge, du rosé, du vin orange, le vin de paille, le vin fortifié. Je suis plus à choisir des cépages qui vont renforcir et élargir notre offre et augmenter les volumes. On voudrait ajouter du vin gris.

En fait, la philosophie qu’on devrait avoir: j’ai deux grandes gammes de vins. Un pour la restauration haut de gamme. Des produits juste pour eux que je ne vends pas ailleurs. Et j’aurais une autre ligne de produits pour les autres clients. Et je voudrais avoir une ligne de produits plus funky qui serait à l’air du temps qui suivrait les tendances et la mode comme le vin orange.

Vignoble de Pomone – source: Ted Van Rossum

La suite du vin orange ça va être un vin qu’on appelle pas orange mais peux-être un vin de ‘’macération pelliculaire’’ ou un autre nom pour que les consommateurs comprennent plus. J’aimerais éduquer les gens la dessus. Les autres vins orange qu’on va sortir on va probablement les appeler autre chose. Cette ligne de produits la serait plus que probablement sous le vocable “macération pelliculaire”. Pas sûre que les gens comprennent ce que ça veut dire un vin orange. Moi je suis partie pas mal tendance’’.

SP: ‘’Moi je suis le gars du champ et le gars du Chai! Et j’essaye depuis le début que je teste qu’est-ce qui répond le mieux à mon sol par rapport au Chai? Ça c’est le but que je recherche le plus. Et j’ai pas encore déterminé ce qu’il y avait de mieux. Un exemple? J’adore le Baco. Pis là je cherche la meilleure place pour le planter. Cet hiver j’ai beaucoup étudié les cépages et ils parlent toujours de sol. Chaque cépage a un sol qui lui est propre. Je recherche le meilleur cépage pour mes sols qui va rendre toute mon expérience au champ et au Chai agréable et faire un très bon produit. Et ça je l’ai pas trouvé encore.

Je sais pas si tu as remarqué mais nos vins rouges ont sensiblement la même signature. Ils ont tous ce goût et cette senteur d’humus, de sous-bois. Le Sélection rouge on l’a travaillé dans la ligne d’un Cahors avec un peu plus de Baco, le Classique on l’a travaillé pour qu’il soit plus souple, plus simple, le Réserve avec plus de notes boisées. Mais les trois ont une belle signature commune. Quant à l’humus ont est parmi les seuls à avoir ce profil là. C’est pas les mêmes clients qui achètent ces trois rouges àa. Et avec le Réserve le temps va l’améliorer’’.

Vignoble de Pomone – Chai (source: Ted Van Rossum)

VF: Depuis que vous avez lancé les vins en juillet en 2019, quels ont été vos plus grands challenges?

SB: ‘’Le plus gros c’est de trouver les meilleurs cépages pour les sols qu’on a ici. L’autre c’est de choisir les meilleurs assemblages. C’est la pire affaire. Parce que tu as vraiment peur de te tromper. Après c’est plus récupérable. Tu peux plus rien faire si tu t’es trompé’’.

SP: ‘’Moi mon gros challenge c’est au chai. Quand je fais mon élevage en barrique de blanc j’ai l’impression que je vais faire un miracle. Et puis je le détruis toujours un peu à la mise en bouteille. J’ai essayé de comprendre pourquoi. Quand ça arrive dans la bouteille me semble des fois que je suis un peu déçu par rapport à ce que j’ai goûté dans la cuve ou le fût. Le vin final est bon, c’est juste la différence entre la bouteille et le fût. Il faut que je trouve pourquoi’’.

SB:  ‘’C’est probablement dû au filtrage. Ça enlève des arômes. Déjà que les hybrides ont moins d’arômes que les Vinifera on dirait que le filtrage a un impact sur les arômes. On pense embouteiller sans filtrer, on a le laissera décanter puis là on va le filtrer. On va regarder le sous-tirage des fûts et le faire avec plus d’attention. Enfin on regarde plusieurs avenues de solutions incluant différents types de filtres’’.

VF: Travaillez-Vous toujours avec Jérémie (Jérémie d’Hauteville – oenologue) ?

SB: ‘’De plus en plus surtout avec les volumes qu’on a et qu’on va avoir. Il travaille beaucoup avec nous. Presqu’à toutes les semaines on teste des échantillons. On fait beaucoup d’analyses très souvent. Quant à l’utilisation d’un œnologue, je n’irai pas me substituer à un œnologue avec toute l’expérience qu’un Jérémie peut avoir.

Jérémie d’Hauteville – Co-fondateur et oenologue conseil – RJ Oenology

Une chose importante c’est que la croissance du vignoble n’est pas en corrélation directe avec les ressources humaines pour faire ça arriver question de rentabilité. Faut jouer avec ça. Une chance qu’on a des collaborateurs des plus motivés depuis quelques années. Des personnes telles Charles Picard qui s’occupe du vignoble et les champs de fruits et Laurent Picard qui est notre directeur commercial et qui travaille aussi dans les champs et le chai.

Moi je suis dans le goulot d’étranglement partout dans le processus. La bonne nouvelle c’est que les ventes rentrent bien. On a beaucoup plus d’inventaire que de dépenses. On va pouvoir prendre le dessus et ouvrir les valves. On devrait être break-even cette année. Ça peut pas faire autrement qu’augmenter, on travaille bien notre réseau de distribution surtout qu’on continue à faire des bons vins. Les deux vont de pair.

Faut pas qu’on perde ce momentum là.

C’est pas pour rien qu’on est dans des grands restaurants comme chez Toqué, Château Champlain, au Club St-James etc, Les produits sont bons! On a aussi développé un bon branding’’.

VF: Qu’est-ce qui se passe avec la certification IGP?

SB: ‘’Nos raisins sont certifiés. Au niveau du Chai il nous reste des détails à régler comme des trucs d’optimisation. On a déjà toute la tracabilité du champ à la bouteille. On va appliquer et obtenir ça rapidement. C’est juste qu’il faut trouver le temps pour le faire’’.

Vignoble de Pomone – Source: Ted Van Rossum

VF: Êtes-Vous toujours en agriculture raisonnée?

SB: ‘’Oui. Moi je passerais bien en bio mais mon chum pense autrement. On fait des tests sur une parcelle avec des produits différents. Il y a tellement de travail à aller bio et c’est pas le moment. On va attendre d’avoir notre air d’aller puis on verra’’.

VF: Tout semble bien aller au Vignoble de Pomone. Les temps semblent bons pour faire la promotion des vins du Québec.

SP: ‘’Si on allait chercher 2% des ventes de vins consommés au Québec il faudrait que les vignobles du Québec doublent tous la surface de leurs vignobles.

En passant c’est ma dernière année dans le mais. Je sème pour la dernière fois au printemps puis à l’automne je donne à forfait les travaux puis les battages. J’écoule tous mes équipements cet été’’.

SB: ‘’Avec le vignoble ça va être bien en masse! Et puis on va travailler à trouver notre personnalité au vignoble. On fait beaucoup d’essais et d’erreurs et ce le propre de notre développement. C’est tout un défi d’harmoniser le champ, le Chai et la commercialisation. Il faut équilibrer tout cette chaîne là. Je pense pas qu’on a la recette miracle mais ça s’en vient’’.