Les changements climatiques dans le monde du vin. Qu’est-ce que ça veut dire pour nous les consommateurs?

Conférence Tasting Climate Change: Michelle Bouffard organisatrice et personalité connue du monde du vin. Conférenciers.
Conférence Tasting Climate Change: Michelle Bouffard organisatrice et personalité connue du monde du vin. Conférenciers.

J’assistais tout récemment à une conférence ‘’Tasting Climate Change’’/’’Goûter aux changements climatiques’’ sur l’impact des changements climatiques dans l’industrie du vin organisé par Michelle Bouffard personnalité bien connue dans le monde du vin.

Cette conférence réunissait divers experts de l’industrie dans le but de trouver des solutions qui permette aux divers intervenants (vignerons, producteurs, fournisseurs, détaillants etc.) de s’adapter à ces changements et de mitiger leur impact. De plus il permettait de cibler les pratiques de l’industrie dans un objectif d’atténuer l’empreinte carbone de tous et chacun.

Changement ou ‘’Chaos’’ climatique?

Quand on écoute les vignerons de partout sur la planète on devrait parler de ‘’chaos’’ climatique. Les éléments sont déréglés et devenus extrêmes. Marc Picon Malivern de la maison Sumarroca nous parlait d’un manque d’eau criant dans la région productrice de Cava en Catalogne avec des températures qui dépassait tous les records.

Déjà la moyenne des températures est de 1.5C supérieure à celles du milieu du XXe siècle alors qu’on voit une baisse des moyennes de précipitations de 57mm/an ce qui est énorme. On prévoit que la quantité d’eau baissera de près de 20% de plus en 2050.

Présentation - Situation dans la Catalogne Marc Picon Malivern
Présentation – Situation dans la Catalogne – Marc Picon Malivern

Les vignerons de la Champagne représentés par Pierre Naviaux du Comité Champagne dénotent de fortes variations dans les quantités d’eau vers la baisse ainsi que la période à laquelle on reçoit cette eau. Idéalement on en voudrait au printemps pas en fin d’été. Évidemment on n’a pas de contrôle sur cette situation qui créé d’énormes problèmes au niveau de la viticulture. De plus les températures augmentent de façon vertigineuse. Depuis les années 60 on voit une augmentation des températures qui ressembleront dans 50 ans à celles du sud de la France donc beaucoup plus chaudes.

Situation climatique en Champagne - Comité Champagne
Situation climatique en Champagne – Comité Champagne

La situation est la même à Bordeaux qui depuis les années 1960 a vu sa température moyenne augmenter (tout comme en Catalogne) de 1.2 C. et ça continue. Complètementde l’Italie qui en 2023 était complètement sous l’eau avec des régions comme l’Émilie Romagne complètement submergée.

Quand on parle aux vignerons de la Vallée du Rhône que je rencontrais au printemps dernier on ne cesse de décrier le manque d’eau et les températures caniculaires. Et parlez à ceux de Chablis qui perdent une bonne partie de leur récolte à cause du gel! Quant au Québec l’année 2023 est à oublier…

Et c’est sans compter les nouvelles espèces d’insectes qu’on voit arriver avec ce réchauffement. On a qu’à penser au scarabée japonais au Québec.

Situation climatique viticole - Bordeaux et Loire
Situation climatique viticole – Bordeaux et Loire

L’effet sur la production du vin…et le vin.

Évidemment ceci résulte plus souvent qu’autrement dans des baisses de rendements, des vignes détruites par le gel ou la grêle ou trop d’eau, une recherche effrénée de solutions à court, moyen et long terme, des augmentations de coûts et beaucoup d’incertitude dans la vie des vignerons. Auparavant c’était une année de mauvaise parmi d’autres. Avec ce chaos climatique on voit ce genre de chose arriver beaucoup plus fréquemment. Combien de baisses drastiques de rendements les vignerons peuvent-ils se permette?

Impact sur les vins - Comité Champagne
Impact sur les vins – Comité Champagne

De plus les vins eux-mêmes sont impactés par ces changements. On voit au fil des années une augmentation du niveau d’alcool de 0.8% vol. et une baisse d’acidité de -1.5 g. Ceci impacte entre autres la sensation de fraîcheur du vin. Et que dire du fait que la taille des raisins a baissée de 26% dans les 30 dernières années en Côtes du Rhône!!!

Avec les tendances mondiales à la baisse quant à la déconsommation du vin et l’augmentation importante des coûts de production avec l’inflation on parle ici d’une tempête parfaite contre les producteurs et vignerons.

Les pistes de solutions

Les diverses conférences portaient sur des sujets aussi variés les uns que les autres. Mais tous tendaient vers un objectif d’adaptation, de mitigation et d’atténuation des impacts de ces changements climatiques.

Pistes de solutions - Marc André Selosse
Pistes de solutions – Marc André Selosse

Ces pistes de solutions se résument globalement vers les actions suivantes :

Les techniques de vinification (grappes entières par exemple pour plus de fraîcheur), la gestion des vendanges (de nuit pour plus de fraîcheur), le gestion du sol (méthodes organiques, régénératives), la gestion du feuillage et de la vigne (plus d’ombre), le contrôle des insectes, la taille de la vigne, le choix des clones (plus résistants aux maladies), le système de plantation (plus ou moins de densité), la sélection des sites (plus en altitude – orientés nord sud), la sélection des cépages (plus résistants à la chaleur) et l’irrigation. S’ajoutent à ces techniques l’agroforesterie, l’ajout de biodiversité dans le but de restaurer les écosystèmes etc.

Ces solutions s’inscrivent dans une approche durable qui impliquent la réduction de l’empreinte carbone, la gestion de l’eau et la promotion et la richesse des habitats naturels.

Agriculture régénérative - présentation Michel Gassier
Agriculture régénérative – présentation Michel Gassier

En fait une présentation de l’agriculture régénérative donnée par Michel Gassier de la famille Gassier décrivait cette approche holistique qui est axée sur 5 piliers dont : l’augmentation de la matière organique dans les sols, la réduction des intrants externes, l’intégration des animaux dans le processus viticole, la biodiversité et l’approche communautaire dans le respect de tous les intervenants. Cette approche va selon ses adeptes plus loin que l’approche organique et/ou de biodynamie qui ne vise que les intrants tels fertilisants, pesticides et intrants comme les sulfites par exemple.

La réduction de l’empreinte carbone

Quant à la réduction de l’empreinte carbone qui s’inscrit dans une approche durable il faut savoir qu’environ 40% de cette empreinte de la production du vin provient des bouteilles selon les données de la conférence. En fait selon la SAQ dans son évaluation de sa propre empreinte carbone, 57% vient du packaging!!

Dans un monde où chaque appellation veut se distinguer d’une autre avec une bouteille différente on est loin d’une bouteille unique (la même pour tout le monde) que le système peut réutiliser et ou recycler.  Si la filière avait un souhait ce serait cette bouteille unique qui réduirait de beaucoup l’empreinte carbone.

Présentation SAQ - Christian M. Pilon
Présentation SAQ – Christian M. Pilon

De plus si on reste sur le sujet de l’emballage, la tendance est vers les bouteilles plus légères qui sont moins chères à produire et coûtent moins cher au niveau transport. Il faut changer cette mentalité qu’une bouteille plus lourde équivaut à un vin de plus haute qualité. Il n’y a aucun lien entre les deux.

Une discussion a aussi eu lieu sur le vin distribué en vrac dans des conteneurs adaptés et embouteillés au Québec. La filière n’est présentement pas prête pour implanter cette solution mais elle présente un intérêt certain.

Enfin sachant que la très grande majorité des vins sont consommés dans une courte période suivant l’achat on peut se demander pourquoi l’ensemble des vins doivent-ils absolument être vendus dans des contenants de verre qui leur permettent de vieillir quelques années!

En fait, les divers contenants/emballages autres que le verre présentent un important niveau d’intérêt de la part des intervenants. Avec la difficulté d’approvisionnement en bouteilles des récentes années de plus en plus lorgnent de ce côté.

L’Importance des certifications organiques/durables pour le consommateur

Plusieurs producteurs (environ de 10-15% sur une base mondiale) décident souvent pour des raisons de conviction ou quelquefois de mise en marché de se tourner vers l’agriculture organique ou en biodynamie.

Cette orientation implique non seulement une régénérescence des sols apportée par l’absence de l’utilisation de produits chimiques de synthèse tels herbicides, pesticides mais aussi une réduction importante des sulfites durant la vinification.

Par contre, ces producteurs doivent se battre contre les aléas chaotiques de la nature et les maladies de la vigne en temps de pluies abondantes et fréquentes avec plusieurs passages de tracteurs pour effectuer l’épandage de produits autorisés telle la bouillie bordelaise à base de cuivre. Ceci augmente les coûts!

D’autres producteurs adoptent des programmes d’agriculture durable (gestion de l’eau, production de leur propre énergie, bouteilles plus légères etc etc.) sans être nécessairement en agriculture organique ce qui est quand même fort louable.

Pour que le consommateur puisse les reconnaître et orienter leurs choix vers des produits organiques ou durables il faut savoir reconnaitre ces certifications sur les bouteilles. Il existe une myriade de certifications ce qui peut causer de la confusion chez les consommateurs. Cependant les producteurs qui sont certifiés sont audités afin de vérifier qu’ils rencontrent toujours les directives dictées par ces vérifications. C’est comme une forme de garantie pour les consommateurs.

Logos vins vins organiques, durables
Logos vins vins organiques, durables

À la SAQ :

À la SAQ les indications suivantes sont obligatoires : • Mention « Biologique / Organic » • Nom de l’entreprise détenant le certificat du produit • Le nom complet de l’organisme qui a certifié le produit (la mention « Certifié par / Certified by » peut précéder au besoin le nom de l’organisme). 18 • L’identification des ingrédients biologiques dans la liste des ingrédients (le cas échéant) Les logos sont facultatifs (exemples : Bio Canada, USDA Organic, etc.)

Les produits équitables peuvent porter la marque de Fairtrade Canada et la mention « Certifié Équitable » peut être inscrite sur l’étiquette. L’utilisation du logo FAIRTRADE n’est pas obligatoire.

Site SAQ : ‘’Dans notre catégorie BIO, on retrouve des produits biologiques, des vins biodynamiques et des vins nature, tous exempts de produits chimiques et de synthèse. Ils détiennent obligatoirement une certification biologique reconnue par le gouvernement du Canada. Magasinez les produits bio disponibles en ligne et repérez-les en succursale grâce à un mica de couleur sur les étiquettes de prix’’.

Que peut donc faire le consommateur?

Le consommateur possède quand même un fort pouvoir d’influence sur les actions prisent par la filière vinicole.

Il peut dire non à une bouteille de vin trop lourde pour rien (sauf pour les bouteilles de mousseux qui requièrent des bouteilles plus solides).

Il peut choisir des vins issus de l’agriculture organique ou biodynamique.

Il peut choisir des vins des producteurs ‘’durables’’.

Il peut acheter encore plus local.

Il peut accepter des nouveaux formats d’emballage comme l’aluminium, le carton et autres types d’emballages.

Il peut acheter un vin à 30$ plutôt que deux bouteilles à 15$.

À bon amateur salut!

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